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De la Défense à la Défonce...

En ce 21 juin 2005, j'ai profité à fond du temps estival quasi caniculaire et des festivités ayant eu lieu à l’occasion de la 24ème Fête de la Musique ; le matin du 21 j'étais au TechnoCentre de Renault à Guyancourt, puis j'ai sauté dans un bus pour rejoindre la communauté d'agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines, où j'ai assuré un cours d'anglais collectif de 1400 à 1800, dans une salle surchauffée, pas tant par l’activité frénétique des cerveaux en ébullition de mes stagiaires que par les températures très élevées relevées à Paris en ce radieux premier jour de l’été. Mes stagiaires et moi-même avons beaucoup soufferts de la chaleur jusqu’à ce qu’un d’entre eux ait l’idée lumineuse d’apporter un ventilateur pour nous soulager un tant soit peu. Il est à présent 18 heures zéro-zéro, je regroupe mes affaires et je me dirige vers la sortie de l’immeuble vieillot qui héberge la société qui offre des cours d’anglais à ses salariés – par le truchement de votre serviteur…

Arrivé à la case départ gare de Saint-Quentin, par une chaleur étouffante, j’apprends que la circulation des trains Grande Ligne et RER est perturbée à cause d’un accident voyageur sur le trajet Orléans-Paris - ce n'est pas la première fois… Une voix suave nous informe de l’infortuné accident et nous indique de prendre plutôt les trains en direction de La Défense. Quelques secondes plus tard, comme quoi la SNCF, si elle n’a pas un train d’avance, a néanmoins de la suite dans les idées, une autre voix non moins suave nous indique que c’est aujourd’hui la Fête de la Musique, et qu’à cette occasion les PASS Imagin’Air sont dézonés. Ravi de l’apprendre. Une voix peut en cacher une autre. Je passe donc mon tour et essaye de rejoindre la gare la plus proche en évitant la case départ. 

Après une attente en pleine chaleur, je m’engouffre dans un RER en compagnie de dizaines d’autres passagers, et nous voyageons serrées comme des sardines jusqu’à La Défense. Rien que sortir du train provoque une sensation presque jubilatoire, qui est cependant légèrement atténuée par le fait que les fameuses dizaines d’autres personnes sortent fatalement avec moi, pour cause de terminus-tout-le-monde-descend. Qu’importe, cette petite foule n’est rien en comparaison avec ce qui m’attendra ce soir dans les rues de Paris, surpeuplées en raison de la Fête de la Musique. Mais cela, je ne le savais pas encore… 

J’avais prévu de me rendre directement à l’église Sainte-Anne, au pied de la Butte-aux-Cailles, car une amie à moi y chante à vingt heures (je devrais y arriver juste à temps) ; elle fait partie de la Chorale de Musique Médiévale de Paris, et ladite chorale interprète ce soir quelques chants religieux choisis. Cette amie repart en outre par le dernier TGV pour Nantes, où elle réside ; nous n’aurons donc que peu le temps de nous parler. Je l’aurai finalement plus entendue chanter que parler ! 

Après la chorale dans l’église (parfait, endroit frais et calme, juste ce qu’il me fallait ce soir après mes pérégrinations dantesques dans le RER, excellent spot pour commencer la soirée), le petit groupe se rend dans le jardin attenant pour y interpréter d’autres chants, profanes cette fois-ci. Beaucoup d’enfants sont là, qui crient pas mal, obligeant les spectateurs (assez peu nombreux du reste) à tendre l’oreille pour capter les voix et la musique d’un instrument ancien apporté pour l’occasion. Comme si le brouhaha incessant des mômes ne suffisait pas, nous eûmes droit à un tintamarre dissonant presque constant, provoqué dans l’ordre chronologique par (1) le ramassage des ordures, (2) un homme qui a probablement jeté tout son stock de bouteilles en verre du mois précédent dans les containers-disposés-à-cet-effet à l’entrée du jardin, et (3) pour couronner cela, les bruits de circulation et de klaxons ! Courageuses chanteuses de la Chorale ! Parmi elles, un seul homme, c’est pourquoi j’emploie le féminin pluriel, j’espère qu’il ne m’en voudra pas… Je doute fort qu’il me lise jamais, de toute façon… Une fois le concert terminé sous les grands vivas de la petite foule, mon amie nantaise Adeline s’en va prendre son TGV ; il se peut que je la revoie cet été à Nantes, au bord de la plage, en compagnie de ma cousine, mais ceci est une autre histoire. 

Ceci étant, après ces concerts médiévaux et sympathiques, il n’est que 21 heures, j’ai donc amplement le temps de me balader un peu et de profiter des groupes plus ou moins amateurs qui jouent ce soir sur les trottoirs de Paname. J'improvise donc un petit circuit, dont je vais vous narrer les principales étapes, si possible musicales : 

Je pars donc du pied de la Butte, et après avoir rempli ma petite bouteille avec l’eau de la fameuse source qui alimente également la piscine éponyme, je remonte la rue principale au son d’un groupe de Samba, puis au son d’un groupe de rock. Le guitariste dudit groupe a le total look Joe Satriani, c’est-à-dire : bob, cheveux ras, lunettes de soleil, y compris les gestuelles, mais, bien évidemment, il n’arrive pas à la cheville de ce dieu de la 6 cordes… Le groupe entreprend une chanson de Janis Joplin, juste avant l’arrivée de tambours bronxiens dont je me demande comment ils vont faire pour progresser dans une foule absolument dense, et qui danse. Je redescends vers la rue Bobillot pour écouter quelques instants un groupe assez sympa, mais toujours rien de bien fracassant, malgré moult bouteilles de bières éclatées sur le bitume… 

Je passe par la Place d’Italie, où, logiquement, un collectif agité de jeunes des cités rivalise d’agilité et de ridicule dans un show rap-dance-break au son d’une vieille sono pourrie. Le public a l’air ravi, puisqu’il est là en nombre. Moi, je passe mon chemin, et mes pas me dirigent vers la rue des Gobelins, assez fréquentée itou. Beaucoup de monde, mais pas grand-chose de musical à se mettre sous la dent, si je puis dire… Deux ou trois groupes épars qui distillent, soit dit en passant, de beaux canards (fausses notes en jargon musical) ; en chemin, j’appelle mon frère pour voir s’il n'est pas dans le coin-coin, mais je tombe sur son répondeur… 

Face à ce manque caractérisé de groupes dignes de ce nom, je m’octroie une petite pause rafraîchissante dans un bistro relativement calme. Un monsieur m’aborde au bout de 5 minutes, moi qui suis en train de lire consciencieusement le Parisien du jour en sirotant une bière ! J'y crois pas, on n'est tranquille nulle part ma brave dame ! En plus, ce monsieur me demande l’origine de toute cette animation dehors. Comme il parle français comme beaucoup de français ne le parlent pas, au départ je pense qu'il se fiche de moi, mais j'apprends bientôt qu'il est suédois, et de passage à Paris à l’occasion du Salon du Bourget car il construit des capteurs détectant la formation de glace sur les avions. On en apprend tous les jours... J'en déduit qu'en Suède, point de Fête de la Musique, donc. On parle français (le sien est décidément tout à fait honnête) et anglais. On cause un peu aviation, et je lui ressors avec une certaine nostalgie mes vieux souvenirs de mon Service Militaire, effectué en 1998 du côté de Bourges et dans l’armée de l’air. J'enseignais la grammaire ainsi que l’anglais aéronautique à des stagiaires qui nous payaient invariablement le restau et la boîte de nuit à l'issue de leur formation… Good old times ! Bon, c'est pas tout ça mais une fois la conversation et ma bière finies, je reprends ma route et, étant pratiquement en bas de la rue des Gobelins, j’ai le choix d’aller vers Montparnasse ou bien vers Mouffetard. J’opte pour Mouffetard sans moufler et je subodore que je me ferai une ch'tite bouffe tard... 

Arrivé vers le Métro Censier, mes oreilles sont attirées par des sons de guitare et une voix fantastiques. Je m’approche, et j’assiste au meilleur concert de ma soirée. Un groupe – 2 guitaristes, un bassiste, un harmoniciste, un clavier et un batteur – reprend des standards de la chanson rock américaine, et la chanteuse – charmante au demeurant – possède une voix chaude, profonde, vibrante comme j’en ai rarement entendu. Ce qui ne gâte rien, elle chante juste et bien une chanson des Creedance Clearwater Revival. Je m’attarde donc longuement aux premières loges, puis le groupe prend une pause méritée et cède la place à des chanteurs a cappella, dont l’un fut membre de feu le groupe Pow Wow. Pas ma tasse de thé, je déguerpis fissa vers d'autres cieux et d'autres sons. 

J’arrive illico presto en bas de la rue Mouffetôt-ou-tard, et j’envoie un petit SMS à ma chef mais néanmoins amie, qui était là récemment avec son Prince Charmant. Evidemment la rue Mouffetard un soir de Fête de la Musique, c’est noir de monde. Des petits groupes amateurs se chargent de chauffer un public majoritairement jeune et féminin, et accessoirement déchaîné. Je cherche du regard un ami mateur parmi ces animateurs, mais je me contente de mater seul, sans somatiser ; je commence quand même d’avoir un tantinet faim, mais, le hasard faisant bien les choses, je tombe nez à nez, dans une petite rue adjacente, avec une échoppe proposant de la nourriture tibétaine. Quelle coïncidence et quelle aubaine ! J’absorbe un délicieux beignet tibétain, avant de me rendre compte que la présence de ce stand providentiel n’a rien d’une coïncidence : il y a un restau tibétain juste à côté ! J’empoche le menu et je reprends mon chemin et je déboule sur la Place de la Contre Escarpe, blindée de monde. On peut à peine circuler. C’est dément ! Je n'ai aucune envie de faire de vieux os Paris-ci. 

Avec tout cela, il se fait déjà relativement tard – je bosse demain et me lève à 06 heures 30 – et je décide de rallier une station de Métro de la ligne 10, qui me déposerait quasiment en bas de chez moi. J’opte pour la station Cardinal-Lemoine, qui ne doit guère se trouver loin. Après avoir jeté encore une oreille à divers groupes de qualités diverses et variées, je descends vers ledit Métro, et je m’octroie ma deuxième bière de la soirée dans un café à l’ambiance survoltée, et dans lequel les amateurs de musique n’ont pas du en descendre que deux, des bières… La musique est bonne, comme le chantait Goldman, et j’apprécie cette petite pause (j'ai pas mal marché, au bout du compte.) Le Métro est juste en face. Je m’y dirige, mais je m’arrête une nouvelle fois devant un groupe punk-rock qui déménage pas mal, et qui se débrouille bien aussi côté instruments. Je ne connais pas les titres, mais c’est assez explosif. La dernière chanson qu’ils interprètent provient d’un groupe punk américain des années 70, disent-ils… Degenerated est le titre de la chanson, en l’occurrence assez adaptée au public massé devant moi, et c’est sur cette chanson, que je garde en tête telle une image sonore rémanente, que je descends dans les entrailles du réseau métropolitain de Paris. Le Métro ne tarde pas trop, et bien sûr il est plein à craquer. 

Mais je ne craque pas, moi, je suis content de ma soirée, passée en solo pour cause de brouille sérieuse et définitiveavec Sandra. Je décide de descendre à La Motte-Picquet. Il doit être plus de minuit, mais je m’attarde encore un peu auprès d’un groupe qui termine son concert avec la chanson de Jean-Louis Aubert Voilà c’est fini ; titre fort approprié vu la situation personnelle dans laquelle je suis, et excellent titre également pour clore une Fête de la Musique urbaine et bigarrée, moyen idéal de se plonger un peu dans la foule populaire de la France d’en bas.  Mais la France d’en bas, elle bouge sacrément, et elle s’amuse, Monsieur ! J’ai retrouvé au cours de cette soirée une atmosphère de communion autour d’un événement festif, ce qui se fait rare de nos jours. On dit les parisiens stressées et renfermés, mais il en faut finalement peu pour qu’ils se réveillent et se révèlent… 

Bref, je me suis shooté à l’optimisme ce soir ! J'espère qu'il n'y aura pas de contrôle, je serais positif... De ce point de vue là, la soirée fut très réussie, et puis j’ai aussi apprécié la liberté que me procure ma nouvelle situation. Pour finir, moi qui suis musicien dans l’âme et amateur de musique, j’ai trouvé un évènement à ma mesure, et je l’ai suivi à ma cadence ! Voici ce que je me suis dit en regagnant mon do mi si la do ré. Et Vive la Fête de la Musique !

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