Je me suis dit qu’il était temps de vous raconter un peu comment se passent mes cours du soir à l’IUT de Paris, puisqu’ils sont sur le point de se terminer ; l’issue en est fixée au mardi 28 mars 2006. Dernier cours en forme d’apothéose, si je puis dire, qui prendra la forme d’un Devoir Sur Table final, ce qui donne d’ores et déjà des sueurs froides à mes étudiants...
Mon entretien initial se passe de façon très informelle, il faut dire que je fus recommandé à l’IUT par une collègue de Langues & Entreprises, société dans laquelle je travaille à plein temps. Vous l’aurez compris, j’assure ces cours du soir en plus de ma charge de travail habituelle, c’est dire que ces derniers mardis furent plutôt chargés pour moi ! Mais finalement, en comparaison des longues journées vécues par les étudiants, je n’ai pas à me plaindre… D’autant plus que les circonstances sont idéales : les mardis je travaille dans un Centre de Ressources à Clamart, chez Schlumberger, et ma journée n’est donc pas aussi épuisante que lorsque j’enseigne en cours particuliers ou collectifs, avec de nombreux déplacements en Métro entre chaque cours. De plus, en parlant de déplacements, le transport pour me rendre de Clamart (proche d’Issy-les-Moulineaux et de son RER C) au XVIème Arrondissement de Paris ne me rend pas cette nécessaire transhumance trop pénible, puisque le trajet est relativement direct et rapide.
Il faut dire aussi que je ne me sens pas trop dépaysé à l’IUT puisque, et c’est là toute l’ironie de l’histoire, je fus moi-même étudiant là-bas il y a 10 ans exactement, en formation initiale, pendant 2 ans, dans la filière Techniques de Commercialisation ! Je suis donc très heureux de traîner à nouveau mes guêtres dans cette université dont j’avais aimé l’atmosphère, et dont j’avais davantage profité de que lors de mon pourtant plus long passage à l’Université Paris III (Sorbonne Nouvelle)… Bref, la boucle s’est trouvée bouclée !
Une soirée de formation typique
J’arrive à l’IUT vers 18h00, et j’en profite pour savourer le délicieux Mokaccino disponible dans les machines à café du lieu ; á l'instar de Proust et de sa fameuse madeleine, la dégustation de ce breuvage au goût rare et unique me replonge 10 ans en arrière… Les lieux ne sont pas tellement différents, ils ont seulement été refaits à neuf depuis mon passage. Quelques aménagements nouveaux sont à signaler (escalier de secours à l’extérieur, couverture du passage entre les deux bâtiments), mais globalement l’endroit reste conforme à mes souvenirs. Je profite également de ma présence hebdomadaire pour récupérer quelques exemplaires de Libération, offerts aux étudiants, que je redistribue ensuite à mes stagiaires dans le cadre de mes formations en face-à-face. En résumé, j’optimise ma présence et je me valorise à moindre frais !
Ma présence en ces lieux universitaires se sera étirée sur 10 semaines, de mi-janvier à fin mars grosso modo. Une fois la dernière séance assurée, j’aurai presté 30 heures de cours. J’ai sélectionné un support de cours ad hoc et j’ai recyclé pas mal de trucs pédagogiques engrangés en presque 8 ans de carrière dans la formation en anglais. Pour la petite histoire, le long de ces 8 ans, combien de cours ai-je assuré en pilotage automatique, combien de séances de formation ses ont-elles déroulées sans préparation préalable, combien d’heures de cours furent-elles basées sur des conversations sans contenu travaillé, sans support tangible, sans trame préparée à l’avance ! Rien de choquant : nonobstant ma propension à rendre mes cours intéressants et ma capacité naturelle pour l'improvisation, je sais préparer un cours efficacement quand il le faut – j’ai eu en face de moi pléthore de VIP d’entreprises, nombre de gens très très importants et pas forcément très très imposants en anglais, et comme je le disais, l’expérience permet de faire face et d’offrir toujours une image de professionnalisme. Et puis combien de salariés se satisfont-ils au bout du compte de simples instants d’échanges, combien de personnes n’aspirent-elles qu’à une bonne pratique orale, s’exprimer, se faire corriger, apprendre en écoutant ? J’en aurais des anecdotes à raconter… je me dis que cela pourrait faire l’objet d’un prochain post, pourquoi pas ?
Mais revenons à nos moutons. Arrivée à 18h00, donc, quelques instants de détente, discussions impromptues avec tel ou tel élève arrivé en avance - généralement d’ailleurs, il s’agit toujours du même, Alain, la cinquantaine, débonnaire soixante-huitard, et jamais à court de questions. A l’heure dite, je récupère la Feuille de Présence à la Loge (ouverte jusqu’à la fin des cours), et grimpe quatre étages sans ascenseur pour rejoindre ma salle de cours et retrouver mes étudiants, dont quelques uns sont déjà arrivés et installés. Le reste du groupe arrivera ultérieurement, un par un. Toujours le même noyau dur d’assidus. Et toujours le même plaisir de revoir ces têtes à présent familières, d’avoir un vrai rapport humain avec ce groupe hétérogène mais fort sympathique. Chacun a sa propre personnalité, et je m’amuse à plaisanter avec tel ou tel, à (sur)jouer parfois au professeur effaré par les commentaires ou les réponses de ses ouailles… Pour moi, l’enseignement en cours collectifs est fort similaire à une pièce de théâtre dont les élèves et le professeur seraient les acteurs. Bill Shakespeare n’écrivit-il pas : « La vie est un théâtre et nous en sommes les comédiens » ? Je le pense. Le formateur est juste un tout petit peu plus acteur que ses élèves.
Je respecte le timing à la perfection, et m’arrange toujours pour faire une pause bienvenue vers 20h00, ce qui permet d’aérer nos esprits ainsi que la salle de cours, qui s’échauffe souvent autant que les esprits susnommés. C’est aussi l’occasion de discuter de choses et d’autres avec Nicolas, Sabine, Jacques et consorts. Boulot, politique, choses de la vie, ces gens-là ont des choses à dire, et, je dois le reconnaître, un dynamisme que n’entache pas même le vocabulaire informatique le plus ardu, les concordances des temps les plus alambiquées, les points de grammaire les plus idiomatiques… J’ai appris à connaître un peu ces étudiants lors de ces moments de calme, dans la chaleur d’une conversation, d’une cigarette et d’un café ; et souvent dans le froid d’un hiver plutôt rigoureux… Ils me manqueront, ces instants précieux. Ils me manqueront, ces échanges authentiques et sans faux-semblants. Et elles me manqueront, ces têtes amies auxquelles je me suis attaché.
Fin de la pause. La dernière partie du cours passe assez vite. Tout le monde est là, à présent, et je concentre conséquemment le travail sur l’anglais informatique, alors que dans la première partie j’aborde plutôt des points linguistiques généraux, de la grammaire, puisque les étudiants-salariés, qui viennent de tousles coins de la région parisienne, arrivent habituellement en ordre dispersé, et après l’heure officielle. Quelques uns me demandent, pour telle ou telle raison, de partir en avance. Je termine toujours à l’heure dite, soit 21h30. Je range mes affaires, efface le tableau blanc, remets la Feuille de Présence signée à la Loge, me saisis de quelques exemplaires de Libé, et pousse la porte de sortie, mon journal sous le bras, attaché-case en main, et l’esprit satisfait. Je marche jusqu’au Métro le plus proche (ligne 10), qui me dépose prestement à 10 minutes de chez moi. Arrivée en mes pénates à 22h00. Jusqu’à la semaine suivante. Jusqu’à ce que les cours s’achèvent. Encore une séance avant que la salle de cours ne reste définitivement dans la pénombre de mardis soirs sans anglais. Finalement, je m’en plaindrai certainement plus que mes étudiants…