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manset - Page 12

  • Amour Rémanent...

    Je me dis parfois qu'il en va de l'amour comme de la chimie ou des mathématiques. Oui, je sais, la comparaison n'est point évidente et ne saute pas aux yeux de l'esprit au premier abord... En réalité, j'entends par amour la fin de celui-ci. Quel est le sentiment que l'on éprouve, dans le meilleur des cas, pour l'être que l'on aimât, et que l'on a finit d'aimer ? Pour ma part je pense que cette question mérite réflexion car je suis enclin à penser que nul amour n'est éternel. Je rejoins à ce sujet un artiste comme Gérard Manset, qui écrivit dans une chanson :
     
    Deux pigeons s'aimaient d'amour tendre / Mais le filet peut bien se tendre
    Tout est gibier qu'on plumera / Y a-t-il un bonheur ici-bas ?
     
    Des mots forts. Des mots qui résonnent douloureusement. Des mots restrictifs pour des maux indicibles. Mais aussi, pour peu que l'on soit un tantinet philosophe, des mots qui évoquent l'importance de saisir l'instant présent. Les latinistes me rétorqueraient : "Carpe Diem" ; oui, les émotions amoureuses que l'on ressent, comme toutes nos émotions, toutes nos pensées, ne sont que transitoires. Qui peut se targuer de ne point changer d'avis, de ne jamais l'avoir fait ? L'esprit humain est tout sauf figé, ce qui nous laisse toute liberté d'apprendre, de se faire son propre avis, de peser le pour et le contre et de se parfois rallier à des arguments qu'on n'aurait pas cru pouvoir accepter... Nos amours n'échappent pas à cette règle. Dans un sens, me dis-je (et à moins de constamment renouveler l'attrait de son couple), tant mieux ; cette Loi fait que d'un amour éteint un autre peut renaître. Et avec lui les moments délicieux de la séduction, de la découverte de l'autre, de l'énergie vitale qui recircule dans le bois qu'on croyait pour toujours asséché.
     
    Alors oui, une fois l'amour envolé, quel sentiment nous reste-t-il ? A vrai dire je vous pose la question. Je ne saurais le nommer. Pas la tendresse, pas l'affection, pas la tristesse, ni même le regret. Quelque chose de précis pourtant. Un sentiment qui serait comme un précipité issu d'une solution (souvenez-vous de vos cours de chimie) : ce sentiment unique mais insaisissable émane de l'amour, mais n'en est pas. C'est une sensation Canada Dry. On dirait de l'amour mais ce n'est pas cela. En mathématique je prendrais l'exemple d'une fonction f(x), que l'on dériverait. La dérivée de notre fonction f(x) est bien évidemment autre chose que cette dernière, et c'est bien évidemment quelque chose de fort différent. Et pourtant, notre dérivée est elle aussi issue d'une matrice originale (comme le soluté chimique) dont elle ne conserve que des qualités associées, qui sont autres que celles de la fonction originale. Voyez-vous ?
     
    Je ne crois pas que la langue française possède un terme qui rende cela. Si vous avez des propositions, je suis preneur. Mais voilà à quoi je pensais récemment en me souvenant de l'être aimé. Sans regret ni tristesse, puisqu'un chapître est bel et bien clos, mais peut-être avec une pointe de nostalgie car de beaux moments il y en eu. Mais il y a autre chose. L'assurance que nos deux coeurs furent mêlés autrefois, et que des liens indestructibles subsistent. Des liens qui ont jadis attaché deux humains comme seul l'amour peut attacher. Les liens ont été arrachés, mais des traces subsistent. J'appellerais cela : amour rémanent. Il reste de l'amour comme un parfum, une sensation. Comme un membre coupé dont on perçoit encore les douleurs. L'amour peut être aussi comme un fantôme, il se rappelle à nous de temps en temps, mais il n'est plus vraiment là.