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Film - Page 49

  • Broken FLOWERS : Fleurs cassées, rêve brisé...

    Lundi 02 octobre 2006. J'ai regardé ce soir á la TV (Canal+ Cinéma) le fameux film BROKEN FLOWERS, et, bien que je le vis á sa sortie au cinéma, je l'ai encore une fois apprécié á sa juste valeur.

    medium_Broken-JP.jpgC'est vraiment une comédie douce-amère, qui vire plutôt vers le non-sens, tellement les tribulations quasi surréalistes de Bill Murray semblent ne (le) mener à rien. Sorte d’enquête policière 20 ans après, sauf que bien évidemment toute trace de preuve a disparue corps et âme. Il ne reste que des images rémanentes, une machine a écrire, un ruban, une lettre – de couleur rose, comme un immense pied de nez dérisoire et grotesque à l’obstination toute sisyphienne dont ce Don Juan vieillissant fait preuve, lui qui cherche à son corps défendant un sens à sa pauvre vie monotone. Mais à ce petit jeu, c’est un peu qui perd gagne et l’on ne gagne pas toujours à être père... En tous les cas je fus touché par la galerie de portraits brossés avec énormément de sensibilité, et l’ambiance acidulée qui se dégage de cette oeuvre. On ressort de la salle en se disant : “tout ça pour ça ?”, un peu comme si le film avait ouvert une boîte de Pandore, nous laissant seul et aussi désemparé que le personnage principal... On pourrait aussi méditer sur le fait que même si le voisin fan d’investigations policières a pensé bien faire en lançant Bill Murray sur les traces de son présumé fils, il ne lui a sans doute pas rendu service, au final... Vous avez dit que la route de l’Enfer est pavée de bonnes intentions ? Mais oui. 

    Dans ce film, on retrouve l’idée de cercle, de vertige, de puits sans fond. Le trou noir béant de notre existence vide de sens. Bill Murray, père putatif  dans BROKEN FLOWERS se retrouve étourdi  par l’immensité de sa tache (retrouver sa progéniture) (le réalisateur  rend cela à la fin du film grâce à un mouvement circulaire de la caméra autour de la tête de Bill Murray, qui lui / nous donne le vertige) ; Bill Murray se retrouve grosso modo à son point de départ lorsque le générique de fin nous tombe dessus... C’est un peu comme au Monopoly, on avance tranquillement, et puis c’est “retour à la case Départ sans toucher 20.000 francs” ! Avec une amertume diffuse en prime. 

    medium_broken_poster2.jpgCe qui est passionnant, dans ce film, c’est la primauté donnée aux sentiments humains. Les personnages sont paumés dans une histoire qui les dépasse, d’où cette impression de flou, de décalage, de perte de repères et, somme toute, de profonde impuissance face aux événements de la vie. Les personnages se laissent porter par les circonstances et se raccrochent tant bien que mal à ce qu’ils peuvent : le mirage éternellement renouvelé d’un fils, un amour de jeunesse... Le spectateur se laisse également porter par les périgrinations du personnage, et ressent une profonde empathie pour ce Don Juan vieillissant à côté de la plaque ; au delà de l'intérêt purement narratif et stylistique du film, ce qui nous secoue c'est bel et bien que nous, spectateurs, nous retrouvons in fine face à nos propres interrogations et á nos doutes intrinsèques. Le film, du reste, n’apporte aucune réponse, la quête quasi policiére restant inaboutie, d’où une impression bizarre une fois le générique de fin terminé ; le film reste avec nous comme des images / impressions rémanentes qui nous poursuivraient et nous hanteraient. Le travail peut alors commencer, le film n'est qu'un point d'entrée, un prétexte.

    medium_broken_flowers_212652g.jpgUn film comme cela, tout en nuances, ne paye peut-être pas de mine face aux mastodontes tels que Harry Potter (ou autres superproductions) et il est évident qu’ils ne boxent pas dans la même catégorie, mais finalement les gros budgets plein de poudre aux yeux de Perlimpimpin nous paraissent bien fades au bout du compte, puisqu’ils sont dénués de tout sentiment, de toute tentative d’approche de la vraie vie. Je vois là une différentiation ontologique entre oeuvre d’auteur et film de divertissement. Personnellement je ne suis pas contre le fait d’aller voir un film de merde de divertissement en toute conscience mais je sais a priori à quoi m'attendre : à rien d’autre qu’à une profonde vacuité du propos et une mise en abyme du vide constitutionnel de notre société moderne, qui a depuis bien longtemps tourné le dos à toute velléité spirituelle. Avant que le film Harry Potter ne commence à décoller vraiment, on nous jette à la figure des effets pyrotechniques très spécieux, et qui ne font en rien avancer le Schmilblick … Avec BROKEN FLOWERS, le Schmilblick n'a sans doute pas beaucoup avancé non plus, mais au moins cela NOUS a fait un peu avancer, et cela vaut toutes les poudres de Perlimpimpin au monde !!